Non-dits : les faiblesses de la communication humaine

Quand tu gardes pour toi une situation inconfortable, il y a 2 choses qui peuvent se passer : soit tu restes seule avec des “pourquoi”, des “je culpabilise”, des “j’aurais dû”, ou alors, tu finis par exploser auprès de la personne que tu considères comme responsable de la situation.

Photo by Kristina Flour / Unsplash : Silence
Photo by Kristina Flour / Unsplash

La communication existe depuis des années et celle des êtres humains s’est vue devenir l’un de leurs plus grands atouts. Elle s’est vue se développer, au travers des siècles, au travers de nos 5 sens : nous communiquons par la vision : nos yeux voient. Nous communiquons par l’audition : nos oreilles entendent. Nous communiquons par l’odorat : nos nez sentent. Nous communiquons par le goût : nos bouches mangent, boivent. Nous communiquons par le toucher : nos peaux ressentent. Jusqu’à ce que nous trouvions d’autres moyens plus élaborés de communiquer : la parole et les écrits (comme je le fais aujourd’hui). La communication n’a jamais été aussi variée qu’actuellement. Et pourtant, malgré toutes ces possibilités, ces façons de parler, il existe encore des failles. Des grosses failles qui sèment la pagaille dans nos amitiés, nos amours, nos travails et notre famille. Nous savons comment utiliser ces systèmes de communication (pour ceux que nous n’avons pas laissés de côté). Parler et écrire sont devenus les 2 canaux principaux. Mais que se passe-t-il si, contrairement aux autres canaux, comme la vue, le goût, le toucher, l’ouïe ou encore l’odorat, il existait une partie de la communication dans la parole et l’écrit qui était omise ? Peut-on oublier, mentir, omettre de communiquer quelque chose au travers des 5 sens ?

Imagine-toi devant un gâteau. Visuellement, il est beau. Il donne envie. En approchant ton nez, tu peux sentir l’odeur du chocolat monter en toi. Lorsque tu découpes une part, tu peux entendre les fines parties se séparer. Ce son si subtil et si doux qui te conforte dans cette volonté de le déguster. Tu entends, rien qu’en le découpant, qu’il sera majestueusement bon. Puis, tu oses le “sans cuillère”. Tu le prends entre ton pouce et ton index. Il tient entre tes doigts. Au travers de ta peau, tu le ressens. Il semble parfait. La texture que tu aimes. Quand alors, tu décides de l’amener en bouche. Et là… mille et une saveurs sont impliquées : c’est délicieux. Ton visage en dit long. Ta posture en dit long. Tes vibrations en disent long. En fait, tes 5 sens en disent long. Et si, à ce moment-là, ce n’est pas toi qui as fait le gâteau mais une copine, et qu’elle attend avec impatience de savoir si tu as aimé. Elle n’a pas besoin de t’entendre parler pour savoir si cela te plaît. Elle n’a pas besoin de ta voix. Elle n’a qu’à regarder ton visage, ta posture, tes vibrations pour comprendre si son gâteau t’a fait voyager ou non. Et peu importe ce que tu lui diras par tes mots, ce sont tes sens qui vont la marquer. Car c’est initialement ça la communication : les 5 sens. La communication la plus pure. Car si ce gâteau n’était pas beau, ne sentait pas bon, ne se découpait pas bien, te dégoûtait et que par-dessus tout, n’était pas bon… tu n’aurais pas eu besoin de le lui dire pour qu’elle le sache. Ta copine aurait très vite compris que tu ne l’aimais pas. Et c’est pour cette raison que la communication des 5 sens ne ment jamais. Par contre, la parole, ce que tu dis, et les écrits, ce que tu transmets, sont réfléchis. Ils sont conscients, ils sont pensés. Ils peuvent être travaillés. Ils peuvent être modifiés. Ils peuvent être mensongers. Ce sont eux qui sèment le doute quand les 5 sens disent quelque chose et que la parole dit autre chose… “hum il est bon ce gâteau”, alors que ton visage ne semble pas comblé.

La communication, au travers des 5 sens, est utilisée par les animaux, alors que la parole et les écrits comme nous les connaissons en tant qu’êtres humains, ne leur sont pas accessibles. C’est ce qui fait notre force, mais aussi notre faiblesse. Et cette faiblesse est d’autant plus marquée quand la communication est omise, mensongère ou déviante. Si je décide, en tant qu’autrice, de publier cet article aujourd’hui, ce n’est pas pour t’apprendre à parler ou à écrire. Ce n’est pas pour te dire ce qui est bon ou mauvais. Ce n’est pas pour que tu changes ta façon de communiquer… mais c’est pour que tu prennes conscience de la pesanteur de tes mots parlés, écrits, pensés. C’est pour que tu te rendes compte que ce qui se passe dans ton cerveau. Que ta réalité, n’est pas celle des autres. C’est pour que, lorsque tu fais face à une situation qui ne te convient pas, tu ne restes pas seule, avec tes pensées. Tes pensées sont un flot interminable. Bonnes, mauvaises, réelles, déformées. Elles peuvent prendre toutes sortes de formes. Et quand tu te projettes dans une situation, une situation inconfortable notamment, tu peux créer des pensées, des faits, des idées, qui n’existaient pas. D’où l’importance de parler, d’écrire, de communiquer, auprès de la personne concernée. Celle auprès de qui tu aimerais rétablir la situation, clarifier une situation.

Aujourd’hui, j’aimerais te parler des non-dits. De ces choses que tu ressens, qui te font te poser des millions de questions. De ces choses qui t’envahissent. Je réponds ainsi à l’appel d’une de mes copines qui m’a conté sa déception, en amitié. Elle avait été proche d’une amie mais le temps a passé et lorsqu’elle l’a récemment croisée, elles n’avaient rien à se dire. Ma copine était désemparée de cette situation. Un mélange d’émotions… de tristesse… de culpabilité… de colère. Une incompréhension planait. Qu’est-ce qui avait changé dans leur relation ? Pourquoi une distance s’était-elle installée à tel point que plus aucune communication n’avait de sens ? Je n’en sus pas plus de cette histoire. En vrai, cela n’a pas d’importance. Ce qui compte réellement, c’est de pouvoir le communiquer. Si je m’arrête sur cette situation précise, je vois deux personnes, anciennement proches, qui aujourd’hui n’ont rien à se dire. J’ai le témoignage de l’une d’entre elles qui mentionne être confuse face à la situation. Je n’ai aucune idée de ce que vit l’autre personne. À cela, et pour ne pas rester dans le brouillard, j’invite ma copine à parler ou à écrire. Tant que tu restes dans le non-dit de ce que tu ressens et de ce que tu penses, tu te fais du mal. Il y a tellement de manières de communiquer que de s’en priver pour ne faire que ruminer sur une situation est une perte d’énergie. Alors bien sûr, il y a des manières pour communiquer. Car chaque personne reçoit l’information à sa manière.

Quand tu gardes pour toi une situation inconfortable, il y a 2 choses qui peuvent se passer : soit tu restes seule avec des “pourquoi”, des “je culpabilise”, des “j’aurais dû”, ou alors, tu finis par exploser auprès de la personne que tu considères comme responsable de la situation. Les non-dits qui te pèsent doivent être extériorisés, au risque de provoquer de graves conflits. Mais il est peut-être plus sage, parfois, de les cacher, bien profondément. Car ils sont lourds. Car ils sont douloureux. Car ils ne sont pas importants. Car ils resteront toujours secrets. Car “si je parle, on va penser ça de moi”. Oui, oser dire les choses est une épreuve. Une sacrée épreuve. Et il y a des façons de dire les choses pour qu’elles soient entendues. En premier lieu, temporiser. Faire un premier essai. Mettre de l’ordre dans tes idées. Qu’est-ce que tu ressens et pourquoi tu ressens ça. Écrire ce que tu ressens. Écrire tout ce qui te passe par la tête. Puis sélectionner. Sélectionner les parties qui te touchent, toi. Les parties où tu parles en Je. Sans jamais accuser l’autre. Sans jamais dénigrer l’autre. En parlant toujours de ce que toi tu ressens et de ce que toi tu constates. De ce que toi tu vis. De ce que toi tu attends. Et ça donne quelque chose comme “par rapport à la situation X, je me sens Y, je constate que Z et j’aimerais que A”. Tu t’exprimes en Je, mais au moins tu t’exprimes. Si c’est trop difficile pour toi de communiquer directement à la personne, alors garde-le pour toi. Rien ne t’oblige à passer le cap. Guéris-toi en premier lieu de cette situation avant d’entamer ta prochaine route. Car si tu n’oses pas te dire les choses à toi-même, tu resteras bloquée dans un cercle, et tu t’engouffreras au fur et à mesure que le temps passe.

Les non-dits sont les secrets les plus enfouis, dans nos cœurs. Tant qu’ils restent au fin fond de nous, ils nous brûlent petit à petit. Ils nous consument et nous épuisent. Plus le temps passe et plus il est difficile de les faire sortir. Et selon la façon dont ils sont extirpés, la douleur peut être conséquente. Mais peu importe le temps que ça prend : 10 minutes, 1 jour, 1 mois, 10 ans. Peu importe ce qui doit être vécu entre-temps. Un jour, ils doivent sortir. Un non-dit qui ne sort pas est un non-dit qui traverse les générations. Un non-dit, bien qu’il ne soit pas communiqué, est une forme de communication : la non-communication. Et le fait de ne pas communiquer a des conséquences. Les non-dits sont la faiblesse de la communication. Ils détériorent les rapports, ils laissent planer des doutes, ils laissent des cœurs brisés, pendant des générations. Mais le jour où enfin ils sortent… le jour où enfin ils sont dévoilés, la communication est rétablie et quelque chose d’énorme se produit. Un sentiment de liberté et enfin, ce jour, tu peux lâcher-prise.


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